Champignons : même les amateurs sont prudents (R.L.)

La saison des champignons démarre tout juste, hâtée par les caprices de la météo. Un plaisir qui suppose quelques précautions, comme le rappelle la vague d’intoxications de la semaine dernière dans le Sud-Ouest.

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Jacques Fleurentin: « Le pharmacien saura toujours donner le conseil qui s’impose.» Photo Pascal BROCARD

Alerte au bolet de Satan ! Les mésaventures gastriques des touristes du Sud-Ouest, victimes en nombre d’intoxications dues à une confusion entre l’excellent cèpe et le méchant bolet bleuissant, viennent à point pour réveiller la prudence des amateurs de champignons.

DOSSIER
Toutefois, alerte ne doit pas rimer avec panique : le bolet de Satan, qui provoque douleurs abdominales, diarrhées et vomissements, est rare en Lorraine. « On peut l’identifier par son chapeau spongieux, son aspect légèrement bleuissant, le réseau rouge sur le haut de son pied », explique Jacques Fleurentin, pharmacien à Woippy et président de la société française d’ethnopharmacologie. Qui, d’ailleurs, ne se souvient pas d’en avoir examiné sur ses terres.
Pourtant, comme tout pharmacien qui se respecte, Jacques Fleurentin ne manque pas d’expérience en matière de mycologie. Ne serait-ce que par formation : depuis toujours, les études de pharmacie comportent un large volet consacré à la connaissance et à la reconnaissance des champignons. Dans l’officine de Woippy, une étudiante en stage témoigne : à la fin de sa deuxième année de fac, elle est tenue de pouvoir identifier plus d’une centaine d’espèces, et ce n’est qu’un début.
« Il faut encourager les cueilleurs à faire examiner leur récolte par un pharmacien, confirme Jacques Fleurentin. Bien sûr, quand nos études remontent à vingt ans, on peut avoir des doutes, mais on saura toujours donner le conseil qui s’impose. » Et ce service d’intérêt public est gratuit.

Sournoise amanite
« En saison, ajoute-t-il, on nous soumet deux ou trois paniers par jour. » Pour l’instant, il n’a encore reçu aucune visite de ce genre, mais il a déjà ressorti l’ Atlas des champignons d’Henri Romagnesi, la bible en la matière. Les folies météorologiques de 2011 – sécheresse, temps pourri, canicule, froidure – font prévoir un calendrier atypique, et les premiers ramasseurs ne devraient plus se faire attendre.
« Le champignon dangereux par excellence, c’est l’amanite phalloïde, évidemment. Un seul chapeau peut tuer huit personnes ! Et en plus, il est sournois : vous ne sentez rien pendant deux jours, et puis… » Ça, c’est le scénario catastrophe, heureusement exceptionnel. Jacques Fleurentin se méfie d’autres risques, moins évidents. « Le coprin chevelu, par exemple. A ne jamais associer avec l’alcool ! Ou les lactaires, très communs chez nous, dont une seule variété, le "délicieux", est consommable. »
En revanche, le pharmacien, lui-même plutôt adepte de la cueillette pour le plaisir, attend avec gourmandise le moment de se trouver face à quelque trompette-des-morts, ce mal nommé qu’on peut trouver dans nos contrées et qui fait saliver les amateurs. Peut-être en connaît-il un gisement mais, comme tout connaisseur, il le gardera pour lui. Aux néophytes, le bolet à chair jaune ou les vulgaires agarics ! Mais n’oublions pas, sans céder à la psychose, le principe de précaution. Cinq minutes à la pharmacie vaudront toujours mieux qu’une nuit aux urgences.

B. M.
© Le Républicain Lorrain